A propos du 26° Congrès du Mouvement fédéraliste mondial

Bref retour sur les origines du Congrès des Peuples

, par Jean-Francis Billion

L’année 1963 est, en marge et aux frontières du
Mouvement universel pour une fédération mondiale
(aujourd’hui le WFM), celle de la création en mai d’un
Comité pour un Congrès des Peuples promu par les
partisans d’une Assemblée constituante des peuples,
conscients que les plans dressés pour réunir une
Assemblée constituante universelle en 1949, établis dans
l’enthousiasme de l’immédiat après-guerre, sont devenus
irréalistes avant longtemps. Jeanne Haslé et le brésilien
Josué de Castro, plus tard les deux premiers délégués élus
à cette préfiguration d’une assemblée mondiale, la
définiront ainsi : « L’idée du Congrès des Peuples (CDP)
est née de la nécessité de trouver une solution rapide et
efficace à la représentativité effective des revendications
des Citoyens du monde (CDM) » [1]. Alfred Rodriguès-
Brent, résistant et mondialiste hollandais, met près de
quinze ans pour mûrir son projet, aidé du Belge Maurice
Cosyn et du Français Jacques Savary, tous deux
également engagés parmi les Citoyens du monde (CDM,
dont le Registre international a été fondé à la suite de
« l’épopée de Garry Davis » de 1949 et 1950) et chez les
fédéralistes mondiaux [2]. C’est en mai 1963 que le projet
est adopté lors d’une réunion à Bruxelles : il définit « les
origines de l’électorat, l’organisation des élections et le
financement de celles-ci, ainsi que le fonctionnement et
les tâches du CDP et ses méthodes de travail » [3]. Le projet
met encore plusieurs années à se concrétiser. Un Appel
rédigé par Savary et signé par treize personnalités de
renom international, est finalement lancé en mars 1966 à
Paris à l’occasion d’une conférence de presse en présence
de quatre des signataires et en novembre 1968 une
nouvelle réunion à lieu encore à Paris en présence de huit
des signataires dont deux originaires des pays de l’Est et
devant 3.000 participants. La première tranche de
l’élection transnationale par correspondance se déroule
l’année suivante en mars 1969. De 1969 à 1994 plusieurs
autres élections vont permettre, année après année, de
faire voter les membres du Registre international des
CDM, embryon selon la volonté de G. Davis d’un « état
civique mondial », d’associations pacifistes ou
mondialistes et les habitants de collectivités locales
mondialisées de divers pays. Guy Marchand, animateur
avec son épouse Renée jusqu’à leurs décès, du Registre des CDM, définissait le CDP comme « un travail de
laboratoire » dont les élus resteront dans l’histoire, selon
leur propre définition, comme « les premiers citoyens du
monde élus de manière démocratique au-delà des Etats nations
pour s’occuper de gérer symboliquement mais
démocratiquement les affaires de l’humanité tout
entière » [4].

Ce bref rappel historique pour introduire le texte ci-après
rédigé par les actuels dirigeants et promoteurs du CDP
après comme ils le disent eux-mêmes quelques années de
léthargie.

Je souhaite terminer ces quelques lignes, en rappelant que
le CDP, et pour les fédéralistes européens à la même
époque le Congrès du peuple européen (CPE) dont le
principal concepteur et animateur a été Altiero Spinelli,
ont tous deux puisé leur inspiration dans le Congrès
indien de Gandhi qui mena, sur le principe de la nonviolence
la lutte pour l’indépendance de ce payscontinent
(et du Pakistan). Une même volonté politique
était à la base du CDP et du CPE : la volonté de recourir
au-delà et par-dessus les Etats nationaux, au peuple
constituant souverain, européen ou mondial. Ces luttes se
poursuivent aujourd’hui dans la volonté de certains de
reprendre et développer le CPE, d’autres de promouvoir
la création d’une Assemblée parlementaire des Nations
unies, ou au plan européen de promouvoir une
Assemblée constituante européenne au-delà des
prochaines élections du Parlement européen en 2014.

P.-S.

Jean-Francis Billion

Auteur de Mondialisme, fédéralisme et démocratie internationale, coll.
Textes fédéralistes, éd. Fédérop et Institut Altiero Spinelli d’études
fédéralistes, 24 Gardonne - Ventotene, 1997, pp. 218.

Notes

[1Cf. « Vers le Congrès des Peuples - Historique », dans Citoyens du
monde, Paris, octobre 1969, n° 14 ; cf. également les notices
néchrologiques de Rodriguès-Brent et de Josué de Castro, dans Citoyens
du monde, respectivement en 1971 et 1973 ; cf. JFB, op. cit., note 56, p.
74.

[2Cf. Alfred Rodriguès-Brent, « Pourquoi le Congrès des Peuples ? », dans
Congrès des Peuples - Le Congrès des Peuples est la préfiguration d’une
Assemblée mondiale des peuples démocratiquement élue, éd. Club
humaniste, Paris, non daté, pp. 130. Livre collectif reprenant l’histoire du
CDP de 1953 à 1977 de même que ses principales déclarations de son
entrée en fonction, en 1977, jusqu’à 1982 ; cf. JFB, op. cit., note 57, pp. 74-
75.

[3Citoyens du monde, n° 14, op. cit. ; JFB, op. cit., note 58, p. 75.

[4Pour la liste des délégués élus au CDP jusqu’en 1994, cf. JFB, op. cit.,
note 59, pp. 76-76.

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