L’actualité est riche d’évènements donnant à penser aux fédéralistes…

Tout d’abord ce fut l’assassinat de l’équipe de Charlie Hebdo, mais aussi de Juifs et de policiers, par des terroristes se réclamant de l’Islamisme radical. L’équipe de Fédéchoses, dès sa création il y a plus de 40 ans a toujours ressenti de la sympathie pour les caricaturistes de Hara Kiri, puis de Charlie ; pour leur vision « libertaire » du monde, leur antifascisme et leur antinationalisme virulents mais aussi leur critique sans tabous des institutions quelles qu’elles soient, de la militarisation de la société et du politiquement correct. Nous avons d’ailleurs souvent, à l’époque, repris certaines de leurs caricatures dont deux exemplaires illustrent en guise d’hommage ce numéro. En particulier en « une » ce dessin de Wolinski intitulé « L’Europe unie », que nous avions placardé dans les allées d’un Congrès de la JEF Europe à Luxembourg et qui avait beaucoup amusé la galerie y compris les amis belges et luxembourgeois… !
D’où le sentiment que nous éprouvons d’avoir perdu des amis… Antonio Longo explique bien la nécessité pour les Européens de s’unir enfin pour combattre le terrorisme ce qu’illustre également parfaitement l’édito de notre numéro 113 publié au lendemain des attentats new-yorkais du 11 septembre 2001.

Nous revenons aussi sur la Campagne « New Deal for Europe », après la décision de son Comité européen d’arrêter avec quelques semaines d’avance sur le calendrier institutionnel la récolte de signatures pour une ICE ne se justifiant plus après la présentation du Plan Juncker devant le Conseil et le Parlement européens, et sur la nécessité de poursuivre cette action devant les insuffisances présentées par ce Plan ; insuffisance du montant et absence de ressources propres de l’Union européenne entre autres. Une réflexion est en cours concernant les modalités que cette action pourrait prendre et nous espérons avoir de bonnes raisons d’en reparler tant nous sommes convaincus qu’un Plan européen ambitieux de création d’emplois et de développement durable est indispensable en préalable à toute tentative d’action constituante du Parlement européen afin de recréer les conditions d’un consensus en faveur de la Fédération européenne parmi les citoyens.

Nous sommes aussi particulièrement sensibles, dans le cadre de notre action en faveur de la justice internationale et de notre soutien, parfois critique, à la Cour pénale internationale aux persécutions que subissent les minorités chrétiennes ou yézidies et qui les poussent à abandonner des terres où ces peuples ont vécu depuis des temps immémoriaux. Joseph Yacoub dépeint la catastrophe qui se joue au Khabour où les mêmes Assyriens qui y avaient trouvé refuge, après avoir fui successivement le génocide du début du siècle dernier initié par l’Etat turc puis des massacres en Irak en 1933, se retrouvent à nouveau chassés, persécutés, massacrés… Les articles de ce numéro sur l’Ukraine, les minorités et l’avenir européen des Balkans recoupent pour partie les mêmes motivations. Nous en publierons en juin d’autres sur le Moyen-orient en particulier après le terrible message pour la paix dans cette région aux limites de l’Europe donné par la réelection d’une coalition de droite et d’extrême-droite en Israël.

Une bonne surprise en revanche, c’est « le ballon d’essai » de Juncker avec sa proposition d’armée européenne qui nous renvoie à la bataille pour la Communauté européenne de défense qui échoua en 1954 à cause de la France. La question de l’armée européenne pose évidemment celle de son contrôle démocratique par un gouvernement européen et, à ce jour, la classe politique des différents Etats membres ne semble guère avoir repris la balle au bond… La question de l’armée européenne posera aussi inexorablement celle de la Politique extérieure et de sécurité commune de l’UE et celles du siège de la France au Conseil de sécurité de l’ONU et de sa force de dissuasion nucléaire qui n’ont déjà plus de réelles raisons d’être hors d’un cadre démocratique et fédéral européen à construire.

Nous ne sommes pas outre mesure surpris du résultat des élections départementales qui ont mis en exergue l’ineptie d’un gouvernement qui a envoyé les électeurs aux urnes pour des assemblées dont les compétences n’ont même pas encore été précisément définies… et aurons l’occasion de revenir sur la réforme territoriale. Enfin, rappelons à nouveau que la montée de l’extrême droite n’est pour une large part que le fruit de l’incapacité du cadre national actuel de la politique à résoudre les questions qui préoccupent avec raison les citoyens. Sur le terreau de la crise de l’Etat national, qui ne peut que s’aggraver encore, le FN et autres populistes ne peuvent que se renforcer ; il convient donc de bâtir au plus vite le rempart fédéral de la démocratie européenne !

En attendant… et sur un mode plus festif, Fédéchoses tient aussi à faire part à ses lecteurs de l’hommage qui vient d’être rendu à Barcelone par les autorités catalanes à notre ami Bernard Lesfargues, le pionnier et l’un des plus importants traducteurs de cette langue en français et en occitan. Mais, pour nous, Bernard, est aussi un militant fédéraliste et, bien qu’il soit de quelques années notre ainé, l’un des premiers animateurs de cette revue et des deux collections Textes Fédéralistes et Minorités nationales des éditions Fédérop crées à son initiative à Lyon au début des années 1970. Pour lui, comme pour nous, le combat politique pour le fédéralisme est complémentaire du combat culturel pour les langues, patrimoine de l’humanité.