PROJET D’INITIATIVE CITOYENNE proposé par le MFE en liaison avec le Conseil italien du Mouvement européen et les partenaires sociaux.

Pour un plan européen extraordinaire de développement durable et pour l’emploi

I) Objet

Nous demandons à la Commission européenne de proposer un
plan européen extraordinaire pour un développement durable
et pour l’emploi, afin de relancer l’économie européenne et de
créer de nouveaux emplois.

II) Objectifs

1) Un programme extraordinaire d’investissements publics de
l’Union européenne (UE), pour la production de biens matériels
européens et le soutien financier à la production et à la
sauvegarde de bien publics européens (énergies
renouvelables, recherche et innovation, nouvelles technologies
–par exemple les réseaux de télécommunication à haut débit–,
protection de l’environnement et du patrimoine culturel,
infrastructures de transport, réseaux énergétiques, agriculture
écologique, etc.).

2) Un fond européen de solidarité pour le financement de
mesures sociales pour la lutte contre le chômage et pour la
création de nouveaux emplois stables et de qualité, avec une
référence particulière à l’emploi des jeunes. Ce fond devrait
remplacer les Fonds existants –en particulier le Fond européen
d’ajustement à la mondialisation (FEM) institué par le règlement
1927/2006– avec une augmentation de leur dotation financière
et une simplification des procédures d’accès, afin de créer un
nouvel instrument de politique sociale européenne.

III) Motifs

Le « Pacte européen pour la croissance » adopté au Conseil
européen du 28 juin 2012 ne semble pas être suffisant pour
relancer l’économie européenne et lutter contre le chômage,
surtout des jeunes, lequel a atteint des niveaux records dans
l’UE. En fait, au-delà des financements de la Banque
européenne d’investissements (BEI) et de la réutilisation des
crédits provenant des fonds structurels, le budget européen
n’interviendrait qu’à hauteur de cinq milliards d’euros dans le
financement de ce Pacte. A l’évidence les budgets nationaux
de nombreux pays européens ne parviennent plus à générer de
la croissance et à lutter efficacement contre le chômage, en
raison des mesures d’austérité décidées au niveau européen.
Par conséquent, seul le budget européen semble à même
d’intervenir avec efficacité pour relancer l’économie et créer de
nouveaux emplois, grâce à l’attribution de nouvelles ressources
en provenance des rentrées de la Taxe sur les transactions
financières et / ou de la Taxe carbone qui va être créée par les
institutions européennes. Si nécessaire, le Cadre financier pluriannuel pour les années 2014-2020, qui va être adopté par
les Institutions de l’UE, devrait être modifié sur la base de la
clause de flexibilité, pour permettre d’apporter au bilan
européen un pourcentage des entrées en provenance des
nouveaux instruments financiers.

IV) Fondements juridiques

Un plan européen extraordinaire pour un développement
durable et pour l’emploi devrait être adopté par une décision ou
un règlement du Conseil de l’UE, après approbation du
Parlement européen, sur la base de l’article 352 du TFUE. Le
financement de ce plan devrait être assuré, pour l’essentiel, par
le budget européen (sans préjudice d’un recours ultérieur aux
financements de la BEI) grâce à l’attribution de nouvelles
ressources provenant des recettes de la Taxe sur les
transactions financières ou de la Taxe carbone qui va être
créée par les institutions européennes, selon un mécanisme
équivalent à celui qui règle l’attribution d’un pourcentage de la
TVA au budget européen.

Pour un Plan européen extraordinaire de développement durable et pour l’emploi

Dans un cadre mondial en profonde évolution, caractérisé par
la participation d’ensembles croissants de population au
développement, requérant une utilisation rationnelle et efficace
des ressources naturelles (alimentaires, énergétiques),
l’Europe doit tout à la fois mettre en oeuvre une politique de
maîtrise rigoureuse des ressources et faire évoluer son
système économique et son appareil productif vers un dispositif
équitable et durable. Les choix fondamentaux de l’Europe vont
dans la bonne direction, depuis les objectifs mentionnés dans
le Traité de Lisbonne jusqu’aux décisions du Conseil européen
pour 2020. Mais la voie étroite associant la rigueur budgétaire
(qu’il s’agisse des Etats ou des individus) au développement
durable n’est praticable que par un effort européen engagé en
commun. Le développement ne peut reprendre que par des
investissements qui rendront les entreprises européennes
compétitives, en réduisant la consommation et le coût de
l’énergie et des matières premières, en utilisant pleinement les
technologies de l’information, en mettant en valeur et en
diffusant la société de la connaissance, en rééquilibrant le
pouvoir d’achat. L’augmentation progressive du revenu des
citoyens des économies émergentes ouvre pour l’Europe
d’immenses possibilités d’exportation de biens et de services
de qualité. Si l’on n’indique pas clairement qu’il est possible de
mettre en chantier une phase de développement nouvelle et
différente, on perdra l’occasion d’inscrire avec succès
l’économie européenne dans le nouveau cycle mondial. La
capacité de produire des biens industriels à partir de
composants de haute technologie, des services de pointe, des
biens culturels de haute qualité, est déjà effective dans de
nombreux secteurs et lieux de l’économie européenne, mais
elle ne pourra s’étendre, s’accroître, s’améliorer qu’en
s’insérant dans un choix stratégique. C’est à la faveur d’abord
du Marché commun, puis du Marché unique, que l’Europe est
parvenue à entrer dans des cycles d’expansion longs. Un choix
similaire est nécessaire aujourd’hui pour insérer pleinement
l’Europe dans la nouvelle économie mondiale. Les propositions
diffusées au cours de la phase difficile que traverse
actuellement l’économie européenne sont souvent orientées
dans la bonne direction, mais le fait de les limiter aux cadres
nationaux en compromet la possibilité de réalisation, l’efficacité
et l’économie. De même que le programme du Marché unique
de 1992 visait à faire face au coût de la non Europe, les
solutions proposées aujourd’hui sont elles aussi limitées par le
coût de la « non Europe ». L’un des exemples les plus flagrants
est apporté par les investissements pour la recherche -
particulièrement dans le domaine des énergies nouvelles- qui
permettent de comprendre comment des plans uniquement
nationaux et non intégrés au niveau européen aboutissent à un
énorme gâchis de ressources que la nécessaire politique de
rigueur qui doit guider les budgets publics et même les
entreprises privées, ne permet plus.

Il est indispensable de lancer un Plan européen, limité mais
décisif, pour indiquer la direction à prendre, à tous les
opérateurs économiques et sociaux européens. C’est à la
Commission européenne qu’incombe la principale
responsabilité de proposer les mesures nécessaires au
Parlement et au Conseil européen et de les présenter aux
citoyens, aux forces politiques, économiques et sociales
européennes. Le plan doit aussi concerner les relations avec
les zones les plus étroitement liées à l’UE en raison de leur
proximité géographique, en particulier ces pays méditerranéens
qui ont engagé une profonde évolution politique, économique et
sociale. Le plan d’investissement proposé en son temps avec
une grande clairvoyance par le Président Delors doit à nouveau
être proposé et finalisé pour créer les conditions nécessaires
de compétitivité, durabilité et cohérence sociale, pour la relance
européenne. Il revient à la Commission d’indiquer les projets à
soutenir, d’en garantir la faisabilité et d’en assurer la gestion
rigoureuse et transparente. Le budget européen devrait, à
terme, être financé exclusivement par des ressources propres,
essentiellement constituées de la Taxe carbone, de la Taxe
sur les transactions financières et de la nouvelle TVA
européenne. C’est pourquoi les propositions déjà avancées par
la Commission en matière de Taxe carbone et de Taxe sur les
transactions financières constituent les éléments essentiels du
Plan proposé et leur adoption en garantirait le fonctionnement.
En outre la Taxe carbone peut amener le système économique
à des choix durables et elle est compatible avec des mesures
transitoires visant à la faire porter également sur les produits
importés de zones n’ayant pas encore adopté de mesures
analogues. Quant à la Taxe sur les transactions financières elle
peut être utilisée pour rendre socialement soutenable la
transition du système économique en refinançant d’une
manière significative le Fonds d’adaptation à la mondialisation
en en redéfinissant les missions et en déplaçant, au moins en
partie, le poids fiscal du travail non qualifié et précaire sur les
revenus financiers. Le lancement du Plan, avec ses mesures
fiscales européennes communes, devrait être accompagné
d’une réduction des dépenses actuellement engagées
aujourd’hui par les Etats membres dans des secteurs relevant
d’une intervention commune. Pour assurer la transparence et
l’efficacité maximale dans l’utilisation des ressources, il est
nécessaire de prévoir, chaque fois que possible, et assurément
dans le domaine de la recherche de nouvelles sources
d’énergie, la mise en oeuvre de programmes spécifiques et,
dans ce cas, d’agences responsables de l’utilisation des fonds.
Puisque l’objectif principal du Plan est la relance des nvestissements, il faut aussi prévoir des interventions
financièrement significatives - même si c’est avec une
attribution différée - en activant l’émission d’obligations
européennes de projet (Euro Project Bonds), en impliquant la
BEI dans l’instruction et la gestion des interventions pour la
partie du plan qu’elle finance (à travers un « Fonds patrimonial »
qui conserve la propriété des investissements effectués), afin
de disposer - grâce au revenu différé de tels investissements -
de ressources pour les nouvelles générations.

**Indications quantitatives

La Taxe sur les transactions financières permettrait de trouver
environ 30 à 40 milliards d’euros supplémentaires pour le
budget européen afin d’obtenir des crédits adéquats dans le
secteur de la recherche et pour le refinancement du Fonds
institué par la Commission en 2006 pour faire face à la
nécessité d’adapter le marché du travail à la mondialisation. Le
budget de l’Union s’avérerait ainsi proche du seuil des 1,27 %
établi en son temps par les Etats membres. Lors des cycles
précédents d’expansion, l’Europe a réussi à créer plus de 15
millions de nouveaux postes de travail. Le Plan devrait
permettre la création d’au moins 20 millions de nouveaux
postes de travail en considérant qu’il devrait, en particulier,
rendre le secteur des services compétitif et diviser ainsi par
deux le taux de chômage actuel. Le montant des
investissements prévus par le Plan devrait atteindre au moins
300 à 500 milliards, à affecter dans un délai de 3 à 5 ans. Pour
permettre l’émission d’Euro Project Bonds ou une garantie de la
part de l’UE, il faudrait une Taxe carbone capable de produire
un revenu d’au moins 50 milliards annuels pour rétribuer les
émissions. L’utilisation de la Taxe carbone pour soutenir le plan
d’investissements dans la phase de démarrage, serait
pleinement justifié par le fait que la taxe elle-même tendra à
diminuer au fur et à mesure que - grâce en particulier au Plan
proposé - l’économie européenne utilisera des sources
d’énergie non génératrices de C02. Au terme du Plan, l’Union
disposerait d’un patrimoine dont le montant pourrait atteindre
au moins le double de la valeur de l’investissement, assurant
ainsi aux nouvelles générations un soutien adéquat, comme
cela se passe pour les jeunes Norvégiens grâce au « Fonds de
pensions » alimenté par les revenus du pétrole : dans le cas
présent il s’agirait des revenus tirés des nouvelles sources
d’énergie, activé par le Plan à travers les investissements et les
dépenses de recherche. Le « Fonds patrimonial » pourrait, en
particulier, soutenir l’insertion des jeunes Européens par des
projets de service civil et, pour ceux qui, au terme des études,
entrent dans le monde du travail (en se fondant aussi sur
l’expérience d’Erasmus), de formations pour éliminer la
précarité, de promotion d’activités de travail autonome et de
développement de l’entrepreneuriat des jeunes.

**Mise en oeuvre partielle ou intégrale du Plan par un groupe d’Etats membres

Au cas où des difficultés insurmontables se présenteraient pour
la participation de tous les Etats, il faudrait prévoir la possibilité
pour un groupe d’Etats de procéder selon les règles concernant
les coopérations renforcées, en particulier de la part de
l’Eurogroupe et des Etats qui voudront s’y associer, comme
cela est déjà prévu dans les récentes propositions Europlus sur
la compétitivité, présentées par le gouvernement allemand.

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