La justice internationale, les fédéralistes et la Coalition pour la Cour pénale internationale

Vers la ratification universelle du Statut de Rome en Europe

Article publié sur Le Moniteur, journal de la CICC,
édition en français, N° 42

Le statut de Rome de la CPI ayant été ratifié par 42 Etats
d’Europe, la société civile et les gouvernements
européens -y compris l’Union européenne (UE) et ses
États membres- font partie des plus ardents défenseurs de
la CPI, pour la création de laquelle ils avaient joué un
rôle fondamental.

Néanmoins, il reste beaucoup à faire pour parvenir à la
ratification universelle et à la mise en oeuvre du traité
fondateur de la Cour dans la région.

Douze Etats d’Europe n’ont ni rejoint ni ratifié le Statut
de Rome : l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, le
Saint-Siège, le Kazakhstan, la Principauté de Monaco, le
Kirghizstan, la Fédération de Russie, la Turquie, le
Turkménistan, l’Ukraine et l’Ouzbékistan.

Alors que 25 pays d’Europe ont pleinement mis en
oeuvre le Statut de Rome dans leur législation nationale
et que 10 autres l’ont partiellement fait, beaucoup d’Etats
doivent encore franchir cette étape nécessaire. Pour que
les systèmes nationaux puissent exercer leur compétence
vis-à-vis des crimes relevant de la CPI, rendre justice aux
victimes et fournir la coopération et l’assistance
nécessaire à la Cour, il est indispensable que les Etats
adoptent des lois de mise en oeuvre.

« Les Etats d’Europe de l’Est et d’Asie centrale ont
entrepris des réformes profondes mais, malgré le rôle
positif joué par le Conseil de l’Europe, le Statut de Rome
reste considéré comme un traité de second rang, dont la
ratification n’est pas la priorité », explique David Donat
Cattin, directeur des programmes à Parliamentarians for
Global Action (PGA).

D’aucuns espèrent que la ratification du Statut par la
Moldavie en octobre 2010 inspirera ses voisins.
L’Ukraine, premier Etat non partie à avoir ratifié
l’Accord sur les privilèges et immunités de la Cour
(APIC), a, par là même, manifesté un intérêt pour la
Cour. Néanmoins, la crise politique nationale a empêché
la finalisation du processus de ratification du Statut de
Rome, pourtant bien avancé.

Alors que le gouvernement russe a signé le Statut en
2000, le processus de ratification n’a jamais été mené à
bien. La coopération de la Russie avec la CPI dans le
cadre de l’examen préliminaire en Géorgie pourrait être
considérée comme un signe d’engagement positif.

Dans le Caucase du Sud, où les avancées vers l’adhésion
à la CPI sont moindres, la Géorgie est le seul Etat partie.
L’Arménie a signé le Statut de Rome en 1999 et, alors
que le gouvernement s’était engagé à relancer le
processus en 2007, aucun progrès n’a été réalisé. En Asie
centrale, où le Tadjikistan est le seul Etat partie, les
obstacles à la ratification incluent des situations
politiques instables et l’absence de lois efficaces sur les
droits de l’homme.

Avec ses plus de 300 membres en Europe, la Coalition
oeuvre pour la ratification et la mise en oeuvre du Statut
dans la région et sensibilise à la CPI en organisant des
formations, des tables rondes et d’autres événements pour
inviter à soutenir la lutte contre l’impunité, dissiper les
incompréhensions et faire disparaître les obstacles
politiques et constitutionnels qui pourraient retarder la
ratification.

La Coalition continuera à exhorter l’UE, l’Organisation
pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), le
Conseil de l’Europe et d’autres organisations à
promouvoir la ratification et la mise en oeuvre
universelles en Europe auprès de leurs membres et au-delà,
à la fois de façon collective et dans leurs relations
bilatérales.

« Dans les cas où il n’existe pas de soutien interne à la
ratification, le soutien externe est essentiel pour ce
processus. Les efforts de l’UE pour la promotion de la
ratification du Statut par la Moldavie ont été
fondamentaux », a insisté Veaceslav Tofan de la
Coalition moldave pour la CPI. « L’UE devrait continuer
à fournir une assistance aux pays tiers et à leur société
civile sur la voie de la ratification et de la mise en oeuvre
du Statut de Rome et de l’APIC », a-t-il ajouté.

La lutte contre l’impunité est une priorité pour l’UE, en
particulier via l’assistance politique, financière et
technique destinée à soutenir la Cour et à faire avancer
l’universalité et la complémentarité. En mars 2011, le
Conseil de l’UE a adopté une « décision concernant la
CPI » réaffirmant son engagement à la Cour et à la
justice pénale internationale -une avancée cruciale vers la
mise en oeuvre des promesses d’engagement faites par
l’UE l’année dernière lors de la Conférence de révision à
Kampala. « L’UE devrait poursuivre ses efforts pour
garantir l’incorporation des dispositions de la CPI dans
les accords négociés avec ses voisins, en particulier avec
ses voisins de l’Est tels que l’Ukraine, l’Arménie et
l’Azerbaïdjan, ainsi que dans les accords avec les pays
candidats tels que la Turquie », a déclaré Virginie Amato,
chargée de programme de la Coalition pour l’Europe.