Fédéchoses numéro 56 - 1987

ÉDITO : LA TÂCHE CONSTITUANTE DU P.E. EST RÉAFFIRMÉE

À l’occasion de la célébration du trentième anniversaire des Traités de Rome, la Commission institutionnelle du Parlement européen s’est réunie à Rome, le 24 Mars 1987, et a approuvé (par 24 voix, 1 contre et 1 abstention), la proposition de résolution sur la "stratégie du Parlement européen en vue de l’Union européenne", présentée par le rapporteur Herman. Ainsi s’achève une première phase des vicissitudes causées par l’approbation de l’Acte unique après le Conseil européen de Luxembourg de décembre 1985. Au sein du Parlement européen, dépassant le sentiment de désillusion et de frustration qui s’était emparé de la majeure partie des parlementaires, après que les chefs d’État et de gouvernement aient de fait rejeté le Projet de Traité élaboré par le Parlement, Altiero Spinelli avait de suite reproposé une stratégie de nature constitutionnelle indiquant comme points de repère l’attribution d’un mandat constituant au nouveau Parlement qui sera élu en 1989 et la convocation d’un référendum consultatif sur l’union européenne, afin de faire valoir le poids de l’opinion publique (dans sa grande majorité favorable à l’Union, comme le montrent les derniers sondages eurobaromètres, qui indiquent que 75 % des citoyens veulent les États-Unis d’Europe).

La résolution Herman reprend cette ligne, même si c’est de manière moins nette et plus timorée. Le ton est loin d’avoir la clarté et la vigueur des formulations in itiales de Spinelli, mais il n’en demeure pas moins que l’idée du mandat constituant est réaffirmée et que la voie reste ouverte à l’hypothèse de guer 1’élection européenne de 1989 à un référendum sur l’Union (ou à toute autre forme de consultation populaire sur le même thème).

Un jugement analogue au nôtre a été exprimé à de nombreuses reprises au sein même de la Commission institutionnelle et en particulier un parlementaire italien s’est engagé à présenter en session plénière du Parlement, les amendements nécessaires pour rendre le texte proposé plus vigoureux.

L’approbation de la proposition de résolution Herman a été accueillie positivement par l’Intergroupe fédéraliste de Strasbourg qui s’est réuni le même jour en présence de plus de 200 parlementaires. Après un discours d’ouverture du Président Plumb qui a reconnu l’importance de la présence d’un groupe de parlementaires se déclarant ouvertement fédéralistes pour aiguillonner le Parlement européen, la parole a été donnée au ministre italien Andreotti qui a rappelé l’inadéquation de l’Acte unique pour l’Union et a souligné que par la réaffirmer l’action des gouvernements ne peut suffire et qu’il est indispensable de mobiliser l’opinion publique.

L’issue positive de la réunion romaine a été par la suite troublée par une désillusion dans la mesure où le Comité de présidence élargie du Parlement européen a décidé de ne pas inscrire à l’ordre du jour de la session de mai la discussion de la proposition de résolution Herman. Les fédéralistes ont vivement protesté auprès de la présidence du Parlement européen contre cette décision. Mais ce pas en arrière doit nous rappeler la ou de réalité des faits : avec l’approbation de la proposition de résolution Herman on a seulement fait un premier pas timide, au sein du Parlement européen, en direction de la relance de l’action constitutionnelle.

Les fédéralistes doivent rester vigilants, car les alibis de la classe politique pour ne pas agir sont toujours aussi nombreux (même parmi ceux qui au Parlement européen se proclament fédéralistes). C’est à nous qu’il revient de démasquer les faux prophètes de l’Europe et de leur rappeler que dans deux ans, avant les élections de 1987, nous dénoncerons publiquement tous ceux qui ne se seront pas battus avec décision pour l’Union européenne.