Edito (FR)

, par Chloé Fabre

Ce numéro est traversé de part en part des fondamentaux idéologiques du fédéralisme : la paix perpétuelle comme objectif, le droit, la démocratie, le respect de la diversité comme moyens. Plusieurs articles parlent de la guerre d’agression de la Russie envers l’Ukraine, que ce soit sur le plan mémoriel, la guerre est aussi une guerre de l’histoire, sur le plan culturel avec l’affrontement des politiques linguistiques, ou sur le plan de ses conséquences pour l’Union et son intégration. Ces articles permettent de rappeler, à travers différents regards « la nécessaire création d’une fédération mondiale pour surmonter toute l’instabilité vers laquelle nous nous dirigeons irrémédiablement » comme le rappelle Théo Boucart dans son billet d’humeur.
Cette guerre vient également désordonner complétement le monde d’État-nations développé depuis le Congrès de Vienne de 1815. Comme le disait Bertrand Badie sur France Culture en juin, les États n’ont plus le monopole de la violence, qu’elle soit légitime ou non, d’ailleurs. Ceci accroit d’autant plus l’insécurité mondiale, la diplomatie ne permettant même plus d’établir une relative stabilité.
Cette guerre soulève également la question de l’impérialisme, plusieurs articles sur la question des langues et cultures minoritaires (Corse, Nouvelle Calédonie, Australie) apportent ainsi un point de vue permettant de compléter la critique du nationalisme fauteur de désordre à tous les niveaux. L’un d’eux souligne ainsi le paradoxe de la France où l’on veut assurer le maintien de la souveraineté de l’État au niveau européen et continuer à nier la souveraineté locale dans une dynamique centralisatrice séculaire … montrant bien l’incompréhension fondamentale des institutions françaises vis-à-vis du fédéralisme. En particulier celles de la Vème République.
Enfin, des voix de femmes s’élèvent pour proposer d’autres chemins. L’article de Céline Spector insiste ainsi sur la solidarité comme un élément essentiel de l’intégration européenne. Elle y explique brillamment comment l’ordolibéralisme n’est pas une fatalité et redonne ainsi des arguments qui pourront être utiles dans la perspective des élections européennes de 2024.
Barbara Wootton, dont nous publions un texte écrit pendant la Seconde Guerre mondiale, nous indique également que le socialisme n’est pas possible sans fédéralisme ; on pourrait aujourd’hui étendre cette analyse à de nombreux autres projets politiques fondé sur la solidarité, la coopération.
Nous sommes ainsi ravis de vous offrir, grâce à nos auteurs, un condensé de réflexion sur le monde dans lequel nous vivons, mêlant histoire et temps présent, toujours orienté pour construire un futur désirable.