La crise dramatique de la Grèce nous l’impose.
La Grèce ne doit pas sortir de l’euro, ce choix historique fait pour rendre irréversible le processus de l’unification européenne afin de la conduire à l’unité politique.
Si un pays quelqu’il soit tombe, cela signifie que l’Europe ne constitue plus un projet politique mais un choix du marché.
Si la Grèce tombe, un symbole tombe aussi : la Grèce a été le berceau de la démocratie politique, élément fondateur de la civilisation européenne.
La représentation du problème de la Grèce par le monde politique et les médias a été maladroite. Le déficit public grec était au départ élevé en terme de pourcentage, mais étant donné les dimensions du pays, il aurait été facilement gérable si, au début de la crise, les gouvernements nationaux avaient rapidement répondu par la création d’une union fiscale aux côtés de l’union monétaire (un gouvernement européen de l’économie aux côtés de la Banque centrale européenne).
Mais, guidés par le directoire Merkozy, ils n’ont pas voulu renoncer au fétiche de la “souveraineté nationale” dans le domaine économique mais ils ont maintenu la logique (typique du Fonds monétaire international) du “prêt au pays en difficulté”, sans aucune garantie européenne. Par conséquent, les marchés ont décrété que la dette publique des pays méditerranéens n’était plus “crédible” et ils ont prétendu à des taux toujours plus élevés. Cela a rendu toujours plus problématique le remboursement de la dette, étouffé l’économie réelle en déclenchant une récession sans fin au sein de nos pays.
Et, dans le même temps, les capitaux ont été transférés du sud au nord de l’Europe, vers les pays considérés comme crédibles. La “guerre de la dette” n’est rien d’autre qu’une lutte entre Etats qui vise à trouver des ressources pour financer leur propre dette publique.
Il faut changer de voie et vite. Avec comme objectif d’en arriver immédiatement à un Trésor fédéral européen comme le firent les Américains au début de leur révolution en consolidant les dettes des Etats membres.
A cette fin et contre la logique et la politique de l’échec imposée par le Conseil, le Parlement européen et la Commission doivent proposer et demander l’émission de titres européens de dette (eurobonds) se substituant à une partie des titres de dettes nationales (par exemple celle qui dépasse les 60% du rapport dette / PIB) et garantis par les pays de la zone euro d’une manière solidaire.
Une manifestation précise de volonté politique dans un tel sens déterminerait :
- une réduction immédiate des taux des titres nationaux de dette les alignant graduellement sur ceux du Bund allemand, exactement comme cela s’est produit à l’époque avec la valeur de l’euro qui s’est rapidement positionnée sur celle du D-mark ;
- des élections normales en Grèce, sans la dramatisation de l’alternative « subir ou mourir » qui alimente la cassure du pays et favorise les forces nationalistes et antidémocratiques ;
- la création de fait d’un gouvernement européen dans le domaine économique ce qui rendrait inévitable l’exigence de sa légitimation démocratique dès les prochaines élections européennes de 2014.
La responsabilité et la gestion de la crise ne peut pas être laissée dans les seules mains des gouvernements nationaux. Il faut exiger avec force de l’institution européenne qui représente les citoyens (le Parlement européen) et des gouvernements les plus responsables de mettre en chantier un nouveau processus pour en arriver à un gouvernement fédéral européen.
En revenir à l’Europe imaginée à Ventotene pour conjurer le risque d’une fracture de l’Union. Face à la peur de l’avenir, nous invoquons la force de l’Union, de la démocratie supranationale et de la solidarité concrète.
Pour faire naître, aux côtés de la démocratie nationale, une forme nouvelle de démocratie : la démocratie européenne.