En ces temps de commémoration confuse de la Grande Guerre, deux courts (mais forts) inédits de Stefan Zweig, « La désintoxication morale de l’Europe » et « L’unification de l’Europe » tirent les leçons des sentiments pernicieux qui traversent une opinion publique complètement manipulée. Parmi les avancées suggérées, il est plaisant de constater que certaines ont déjà produit leurs effets bénéfiques – Stefan Zweig, en somme, appelait de ses vœux le programme Erasmus –, tandis que d’autres, comme l’enseignement de l’Histoire dans une perspective européenne commune, débarrassée des poncifs « patriotiques » (en fait, nationalistes) et d’une vision dominée par les campagnes militaires, se fait encore longuement attendre.
Précédés d’une longue préface de Jacques Le Rider qui, à la fois, les place dans le contexte de l’époque (1932 et 1934) et souligne leur actualité toujours – de plus en plus ? – brûlante, ces deux textes nous livrent un vibrant appel en faveur du concept de supranationalité. Nous ne résistons pas au désir de livrer ci-dessous au lecteur un passage particulièrement éclairant de cette préface.
Si Stefan Zweig ne prononce pas le mot de « fédéralisme », sa réflexion visionnaire nous le fait entendre. Il est frappant de constater qu’en ces temps où l’horizon s’assombrissait à nouveau, des esprits lucides formulaient déjà des idées qui allaient, dix ans et une guerre mondiale plus tard, engendrer une démarche volontariste parmi les plus audacieuses que l’Histoire de l’humanité nous ait donné de connaître.
Bonne lecture !
Stefan ZWEIG, « Appel aux Européens », Préface et traduction de Jacques Le Rider, Éditions Bartillat, Paris (Omnia Poche), 7 €, ISBN 978-2-84100-562-8