Éditorial

Crise financière, crise de l’euro, crise de l’Etat national et gouvernement européen…

Dans le cadre de la crise financière, initiée aux Etats-Unis, puis économique et sociale qui a frappé l’Union européenne (UE), comme le reste du monde, longue est la litanie des mesures quasi incantatoires évoquées par les gouvernants européens ou les milieux de la Commission : Fonds européen de stabilité financière, Pacte pour la compétitivité, Pacte pour l’euro, etc… pour tenter de sauver les meubles. Même si, comme le souligne Jean-Pierre Gouzy dans son billet trimestriel, l’on peut espérer que « l’euro soit sorti du pétrin (?) » il n’en reste pas moins que tous les moyens semblent bons aux responsables européens pour éviter la seule solution, évidente aux yeux de la plupart des économistes et de nombreux hommes politiques, qui consisterait à flanquer l’Union monétaire d’un véritable gouvernement fédéral européen. Mais il est à craindre que les chefs d’Etat et de gouvernement, poussés par la frilosité des classes politiques nationales et l’eurosceptisme ambiant, s’en tiennent commodément à la « coopération intergouvernementale sans transfert de compétences » comme le dit si clairement Mme. Merkel… Il est improbable que le Conseil européen du 25 mars suffise à marquer l’arrivée du printemps pour les Européens.

… glaciation et frilosité au Nord… printemps au Sud… ?

Le printemps, en revanche, a commencé à fleurir au sud de la Méditerranée. Certes dans le rire, le sang et les larmes. Mais on ne l’attendait plus de sitôt. Seules les poussées du fondamentalisme islamique semblaient pouvoir ébranler des régimes autocratiques arabes si solidement installés. Voilà le monde confronté tout au contraire à des sociétés civiles arabo-musulmanes mues par les valeurs de liberté, de démocratie et de justice sociale, capables, parfois à elles seules, de renverser les tyrans et de se dessiner un avenir que personne n’osait imaginer. A l’UE de les aider à consolider ces acquis et pourquoi pas, à préparer un lien fédéral entre ces nouvelles démocraties ; à l’UE, encore, d’aider dans cette nouvelle donne Israël à prendre conscience et à accepter que son avenir ne peut être assuré que dans une paix juste qui assure aussi toute sa place et ses droits au Peuple palestinien, dans le cadre d’un Etat viable et dans une perspective à terme, fédérale pour toute la région.

… y aura t’il un printemps en France en 2012 ?

Y aura-t-il aussi en France un printemps politique en 2012 ?… Des sondages récents, et les résultats des élections cantonales, donnent froid dans le dos face à la montée de l’extrême droite à laquelle le Président de la République a ouvert un boulevard en banalisant le discours du Front national par l’accent mis à tour de rôle sur le refus de la Turquie dans l’Europe, la chasse aux Roms, l’identité nationale, la multiplication des lois sécuritaires, la peur de l’Islam, etc. Il est vrai que la France n’est pas, malheureusement, le seul pays en Europe à connaître cette poussée du populisme, du nationalisme et de la xénophobie. Face à l’impuissance des Etats-nations à résoudre les problèmes politiques d’aujourd’hui, c’est la tentation facile du repli sur soi, la tactique éternelle du bouc émissaire, qui peuvent l’emporter. Mais, la structure bureaucratique et centralisée de la France (aggravée encore par la récente réforme territoriale dont on peut craindre qu’elle ne soit pas remise en cause en cas de victoire de la gauche en 2012) et, la connotation fortement présidentielle de la Constitution de la V° République aggravée, s’il le fallait, par la pratique sarkozienne du pouvoir…, en l’absence de tout véritable contre-pouvoirs (malgré quelques surprises venues parfois du Conseil constitutionnel), ne peut qu’aggraver cette tendance.

Dans ces conditions et cet environnement européen, et plus particulièrement français, délétères, il est plus important que jamais de réaffirmer avec force les valeurs du « fédéralisme de la Résistance » chères à notre revue et nées de la lutte contre le nazi-fascisme, fruit il y a plus de soixante ans de la division de l’Europe en Etats nationaux souverains. Nous le faisons avec force dans ce numéro en publiant quatre articles sur Albert Camus et l’Europe, le monde, le fédéralisme…

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