Pour un Pacte sociétal européen

, par Catherine Montfort

Compte rendu de la réunion de réflexion du 6 décembre 2010 - Bruxelles [1]

A l’initiative du Forum permanent de la société civile, s’est tenue à Bruxelles une réunion d’associations nationales et internationales et d’Européens de tous les secteurs d’activité, pour réfléchir ensemble aux conditions pour refonder un accord sur le vivre ensemble qui est au cœur du projet européen : un rapport sur un nouveau Pacte sociétal européen a été présenté et débattu le matin, l’après midi a été consacrée à une action sur la politique de l’UE dans le domaine de l’eau.

Le constat dressé par le Forum est qu’il ne reste pas grand-chose du consensus social de l’Europe d’après-guerre. Un petit groupe de visionnaires rassemblés autour de Jean Monnet avait convaincu six pays de s’unir pour assurer la paix, consolider la démocratie et rétablir la prospérité, avec l’assentiment tacite de leurs populations. Mais, selon Jacques Delors [2], s’il correspondait aux nécessités du moment, ce « doux despotisme éclairé » n’est plus possible ».

Aujourd’hui, un euroscepticisme s’est développé, la mobilisation sur les questions européennes est souvent motivée par le rejet. Nous faisons face à une crise globale, industrielle, financière, économique, environnementale et alimentaire, qui fragilise nos démocraties. Elle résulte du modèle dominant qui a conduit à l’épuisement et au gaspillage des ressources naturelles et alimentaires, à une spéculation financière non contrôlée, à l’exclusion d’une part croissante de la population à l’accès à des biens et services fondamentaux et à des processus de déstructuration des relations humaines tant au sein de nos pays qu’entre nos différents pays. Les résultats de cette mutation génèrent une crise systémique évidente.

Le projet du Forum est de refonder un nouveau « Pacte sociétal européen » avec les citoyennes et citoyens, ainsi qu’entre eux et le monde politique, sur les valeurs, les principes et les objectifs qui doivent guider la gestion des affaires publiques. L’enjeu est de rendre à 500 millions de citoyens le sentiment de vivre dans une société à laquelle ils adhèrent. Pour que la démarche soit démocratique et voulue par les citoyens européens, la société civile doit être associée aux débats préparatoires et indiquer ses exigences et ses priorités en étant régulièrement consultée.

Au XXIème siècle, le Pacte sociétal européen doit viser la prospérité de tous, même avec une faible croissance du PIB, et s’appuyer sur trois piliers : consolider la paix, relancer l’économie et l’emploi en vue d’assurer la prospérité, s’orienter vers plus de citoyenneté solidaire autour de biens communs. Les choix à long terme doivent être affrontés ensemble. Et ces choix à long terme se résument en quatre questions essentielles représentant quatre défis auxquels toute société -et particulièrement l’Union européenne (UE) aujourd’hui- est confrontée en permanence, à savoir :

  • Comment définir la qualité du bien-être collectif que cette société souhaite offrir à ses membres et comment en mesurer régulièrement les progrès ?
  • Comment mobiliser tous les acteurs sociétaux pour atteindre ces objectifs qualitatifs et comment en mesurer régulièrement les progrès ?
  • Comment répartir, équitablement entre tous ses membres, le bien-être collectif ainsi généré et comment en mesurer régulièrement les progrès ?
  • Comment mutualiser, entre tous ses membres, les risques qui, par leur nature, ne peuvent être maîtrisés par une seule catégorie d’entre eux (pauvreté, accident du travail, chômage involontaire, maladie, vieillesse, pollution, raréfaction des ressources naturelles, changement climatique, etc.) ?

Le rapport « Pour un Pacte sociétal européen » évoque de très nombreuses politiques dont certaines peuvent être mises en œuvre rapidement, dans le cadre des Traités, et dont les autres doivent passer par une révision des traités [3]. La relance à moyen terme du projet constitutionnel, comme il a été proposé par Joschka Fischer en juin 2010 et par le « Groupe Spinelli » devrait faire l’objet d’une troisième Convention.

Sans attendre toutefois, le débat se cristallise d’ores et déjà autour de multiples initiatives de citoyens qui travaillent à une « transition » vers une nouvelle économie et une nouvelle société. Le Rapport propose les moyens et les thèmes d’une mobilisation convergente entre des « structures verticales », telles les Institutions de l’UE, et des « structures horizontales », tels les réseaux, les ONG et les individus eux-mêmes.

Quatre propositions ont été retenues pour poursuivre le débat :

  • 1. Revendiquer à l’occasion de la modification ciblée du Traité voulue par les États membres, que soit instauré un système de référendum paneuropéen pour restituer du pouvoir aux citoyens européens dans l’élaboration et la promulgation des règles de leur VIVRE ENSEMBLE.
  • 2. Proposer au CESE l’organisation d’une rencontre de la société civile européenne à l’automne 2011 en vue de préciser les instruments pertinents pour élaborer, adopter et mettre en oeuvre les politiques décrites dans le rapport intitulé « POUR UN PACTE SOCIETAL EUROPEEN ».
  • 3. Inviter l’Université européenne de Florence et le Bureau des Conseillers politiques européens à animer des groupes de réflexion au sein de la société civile en Europe sur les thèmes de la répartition des richesses, des droits et obligations citoyennes, de l’immigration et la démographie.
  • 4. Inviter le Mouvement européen international (MEI) à mobiliser les réseaux sociaux européens via la Blogosphère et le Web pour travailler d’ici la Conférence des Nations unies de 2012 à la mise en oeuvre des éléments d’un Pacte sociétal.