Le « billet d’humeur » d’Alain Réguillon

Union européenne : quelle élection en 2019 ?

, par Alain Réguillon

Dans moins d’un an, les Européens seront invités à voter pour les députés européens, les 23 et 26 mai, cette dernière date étant valable pour la France.

J’ai déjà eu l’occasion d’écrire que le rétablissement du scrutin national en France était une faute car il va focaliser le débat sur des enjeux nationaux deux ans après l’élection présidentielle. La dimension nationale de ce scrutin n’aurait eu de légitimité que si nous avions eu des listes supranationales. Cela n’étant pas, il fallait conserver un scrutin décentralisé en l’adaptant au cadre des nouvelles régions.

Ainsi, les territoires français ne seront pas représentés de façon équitable ; nombre d’électeurs n’auront pas de représentant de proximité ; les états-majors politiques seront les seuls arbitres de la désignation des candidats avec tous les risques que cela comporte en termes de surreprésentation de l’Île de France et de rattrapage de personnalités battues lors de scrutins nationaux et locaux !

Cette perspective ne sera pas de nature à mobiliser des électeurs déjà passablement lassés de voir que tous les changements annoncés ne changent rien et que le débat sur l’Europe se focalise sur les migrants qui, de victimes, deviennent boucs émissaires.

Rien dans les débats actuels, ni au niveau européen, ni au niveau national ne laisse entrevoir le moindre projet. Pas d’orientation claire. Pas de vision d’avenir. Pas de volonté politique et des citoyens pas plus engagés que ne le sont les partis. La chaîne de responsabilité quant au désintérêt de la « chose » publique est à tous les niveaux.

Nous sommes ancrés dans une paresse intellectuelle, dans un égoïsme grandissant et un aveuglement coupable. Le confort, même relatif de certains, l’attente de jours meilleurs pour beaucoup et le souci de préservation de leurs acquis en biens ou en avantages pour un plus petit nombre, paralysent l’initiative et congestionnent la réflexion.

Où va le monde ? Où va l’Europe ? Où va la France ? Autant de questions qui n’ont aujourd’hui pas de réponse. Alors que peut-on attendre d’un scrutin boudé depuis tant d’années par une majorité de citoyens ? Peu de choses en vérité. J’espère me tromper, mais il ne faut attendre aucun projet ambitieux des formations politiques, tant au niveau européen que national. Les populistes et extrémistes ont un boulevard devant eu et je crains qu’ils ne soient les grands gagnants de l’élection européenne de 2019.

Les fédéralistes sont divisés et inorganisés pour prétendre conduire des listes et soutenir un projet mobilisateur. D’ailleurs, trop d’entre eux prétendent que l’élection n’est pas leur affaire et qu’ils ne peuvent se soustraire aux partis qui, pour quelques-uns, comprennent des fédéralistes !

Et pourtant ! Dans un temps où les partis ne jouent plus leur rôle ; dans un temps où l’Union européenne est en passe de se disloquer ; dans un temps où le risque de tension et de division entre États est plus fort que jamais ; pourquoi refuser l’évidence ? Les fédéralistes ont le devoir, non seulement de présenter un projet d’organisation politique, mais aussi un contenu économique, social et environnemental qui prennent en compte les réalités du monde, l’avènement des puissances asiatiques que sont la Chine et l’Inde et la proximité de l’Afrique qui est, pour l’Europe, le prolongement naturel, leur avenir commun étant lié !

Il est trop tard pour le prochain scrutin de se mobiliser dans cette perspective, mais il faut cesser de regarder les trains passer. Le train, il faut le prendre. Mieux, il faut le conduire. Nul autres que les fédéralistes sont à même de relancer un vrai projet pour l’Europe. Mais en ont-ils l’envie ? Peuvent-ils en avoir la volonté ? Auront-ils de cran de relever un défi sans précédent depuis 1945 ?

C’est à toutes ces questions que je vous invite à réfléchir et à apporter des réponses : il n’est pas trop tard, mais il est temps !

P.-S.

Alain Réguillon, Ancien Président de l’UEF France et Président de la Maison de l’Europe et des Européens de Lyon, membre du Bureau de Presse Fédéraliste - Lyon